Comprendre le poids des conditions de travail n’explique pas forcément les réactions des gens, leurs satisfactions et leurs peines. Connaître un peu plus les gens pour les avoir fréquentés au travail m’a fait découvrir, par comparaison ou différence avec moi, quelles pouvaient être leurs réactions individuelles pour exister et poursuivre des objectifs qui leur soient propres. Profondément impliqué dans le conditionnement de l’atelier, j’ai même expérimenté quelque peu la vérité de plusieurs de ces réactions, c’est-à-dire, me semble-t-il après coup, les voies selon lesquelles chacun s’aménage une zone de rationalité, de cohérence, en fonction de ses atouts physiques, sociaux et professionnels. Les attitudes répertoriées, établies, reconnues, ne sont jamais vraiment incohérentes. Elles produisent au contraire un effort constant pour (P.59) dépasser les contradictions entre l’espoir ou le souvenir du métier et le vide du travail, entre la protection de soi et la nécessité de produire, entre son domaine réservé de réflexions, de rêves et de souffrances et le domaine des autres à qui le travail vous confronte quotidiennement, mais aussi la famille, le quartier, etc. (Sainsaulieu, 2019, p. 60)