MARTIN DRAPEAU, 2004
Les critères de scientificité en recherche qualitative
(Becker, 1998) propose une rupture marquée dans le recours à des méthodes visant à assurer la scientificité, soutenant que recherches qualitatives et quantitatives sont si différentes qu’il est illusoire de soumettre l’une au langage de l’autre, encore plus à ses critères.
(Boudreau et Arseneault, 1994 ; Lecompte et Goetz, 1982), parlent de critères de scientificité adaptés tant aux recherches qualitatives qu’aux recherches quantitatives : des mesures pouvant aider à assurer fidélité, validité, objectivité, représentativité et généralisation.
(Mucchielli, 1996) propose une équivalence de méthodes, établissant ainsi un parallèle entre , fidélité et constance, validité interne et crédibilité, validité externe et transférabilité et, finalement, entre objectivité et fiabilité.
Henwood et Pidgeon (1994) soutiennent que les critères de scientificité auxquels un chercheur doit se référer varient selon le type de recherche qualitative qu’il entreprend.
Types de recherche qualitative :
l’empirisme (data display model)
le contextualisme (grounded theory)
le constructivisme (analyse du discours).
Miles et Huberman (1984) : stratégies pouvant permettre une vérification méthodique sans pour autant compromettre les gains que facilite la recherche qualitative en termes de flexibilité ou de sensibilité au sujet d’étude. Ils soutiennent que le monde social existe non seulement en tant que construction de l’esprit mais aussi en tant que réalité objective, ce qui les place dans une
position nettement empirique.
Production significative d’un sens rendant compte des
variations et complexités des sujets et de leurs perceptions
Objectif : Verstehen, c’est-à-dire un construit intersubjectif de la signification (Drapeau, 2002 ; Lessard-Hébert, et al., 1990). Le but ultime est alors d’en arriver à produire ou à générer une nouvelle théorie. Recours à la generativity of theory et au grounding (Glaser et Strauss, 1967).
Analyse du discours (Parker, 1994, 1998). Déconstruire les textes produits par des sujets sans chercher à définir des faits objectifs ou à rendre compte des processus cognitifs des sujets.
Les critères de scientificité en recherche qualitative
Fidélité
Objectivité : méthode impartiale ou d’une attitude qui consiste à s’en tenir aux données objectives,à savoir celles qui sont contrôlables par les sens, écartant de ce fait les données de l’expérience vécue.Ceci étant difficile en recherche qualitative, les chercheurs tentent une appréhension la plus complète possible de l’ensemble du phénomène, y compris de l’impact de leur présence.
Niveau de description
Validité interne
Guba (1981), Pourtois (1988) : recourir à la technique de triangulation des sources et des méthodes.
validité de signifiance des interprétations
validité référentielle
validité de signifiance de l’observation
Validité externe
=> la possibilité de pouvoir généraliser les observations à d’autres objets ou contextes. Saturation et complétude - c à d que les techniques de recueil et d'analyse de données ne fournissent plus aucun nouveau élément à la recherche.
La fidélité fait référence « à la persistance d’une procédure de mesure à procurer la même réponse, peu importe quand et comment celle-ci est produite » (Lessard-Hébert et al., 1990)
Patton : les recherches qualitatives permettent une étude approfondie de la problématique sans pour autant miser sur un nombre important de sujets. La recherche qualitative manquerait de breadth, càd d’une vue plus générale.
Becker : la recherche qualitative permet une étude en largeur car elle s’étend aux épiphénomènes entourant la problématique sans se restreindre à des catégories préétablies comme dans l’usage quantitatif de questionnaires ou d’instruments. Elle manquerait alors de profondeur (depth).
Discussion
Le chercheur doit adapter les critères de scientificité selon les fondements épistémologiques de la recherche qu'il souhaite entreprendre.
Le critère le plus important est LA RIGUEUR
efforts pour démontrer la crédibilité du cheminement
de la méthodologie
de l’analyse des données,
de l’étude des aléas et épiphénomènes sociohistoriques
de la présentation des résultats
souplesse et sensibilité, en évitant la rigidité
Intérêt pour la subjectivité du chercheur
Drapeau et Letendre (2001) : l’un des dangers liés à la pratique de la recherche, et plus particulièrement de la recherche qualitative, est que le chercheur se limite à ne trouver que ce qu’il cherche.
Il importerait que le chercheur s’intéresse à mieux connaître ce
qui le motive vers un domaine (Samalin-Amboise (1985) - recherche sur les enseignantes à la maternelle). Ses intérêts pourraient le trahir par une condamnation, une réparation ou tout autre mécanisme pouvant à première vue faire office de science
Devereux (1980, p. 77) souligne ce danger lorsqu’il écrit que « le
savant cherche à se protéger contre l’angoisse par omissions, mises en sourdine, non
exploitation, mal entendus, descriptions ambiguës, surexploitations ou réaménagements de certaines parties de son matériau ».
Réflexion de soi = (self reflexivity).
Salner (1999) : autodéception (self deception) : l'individu connaît la vérité au niveau du subconscient, mais choisit de l'ignorer au niveau conscient.
Angelergues (1994, p. 1535), le chercheur doit accepter momentanément une certaine
passivité « antinarcissique indispensable pour se laisser pénétrer par le sujet », c’est-à-dire
être en mesure de fonctionner temporairement dans un registre passif et partager les
représentations et l’intimité du sujet. Le chercheur gagne donc à rester ouvert à la surprise.
ces biais tendent systématiquement à rehausser l’image personnelle du chercheur, exagèrent son impression de contrôle de la situation et lui permettent de voir l’avenir avec optimisme
Conclusion
Pirèz (1985) : le débat quantitatif–
qualitatif est un faux débat,
indice de l’insécurité des chercheurs qualitatifs
La quête de la rigueur, nécessaire à toute bonne recherche, ne pourra que se transformer en rigidité si elle est initialement motivée par un désir de se comparer, de se justifier et de plaire.
Les chercheurs qualitatifs ont une identité propre, qui n'est pas à chercher par opposition aux chercheurs quantitatifs.
Vérifier si les observations sont effectivement représentatives de la réalité ou crédibles