Poésie - LA 5 - "Une Charogne", Les Fleurs du Mal, 1857, Charles Baudelaire

La tradition poétique du Memento Mori

Une invitation à la contemplation de la mort

Présentation

Champs lexical de la destruction, de la mort, et de la pourriture, qui agissent comme les marques du temps : "pourriture", "carcasse", "putride", "horrible infection", "ossements", "décomposés", "moisir".

Utilisation du futur : "vous serez" : visée morale

Le recueil

Le poème

L'auteur

Baudelaire (1821-1867) ouvre la voie du symbolisme et inspire les surréalistes. Reprend le principe de "faire de l'art pour l'art". Il peut être critique quant aux clichés de la poésie romantique et lyrique. il s'affirme poète incompris, et également alchimiste : il fait dans ses poèmes un travail de transfiguration, et se donne pour mission de "transformer la boue en or"

Les Fleurs du Mal est son œuvre principale, il y célèbre l'amour mais de manière sadique, immorale, ce qui en a valu le scandale à sa publication en 1857. Il est composé d'une centaine de poèmes, et divisé en 5 sections. Thèmes principaux : Le spleen, l'amour et le temps qui passe. Titre oxymorique : Baudelaire cherche à extraire la beauté du mal.

Long poème de 12 quatrains, alternance alexandrins/octosyllabes --> balancement poétique. Poème dédié à sa maîtresse Jeanne Duval. Titre : alliance du mort et du vivant. Baudelaire reprend le topos du Memento Mori tel qu'on peut le trouver dans des vanités. C'est le désir de provocation qui est recherché dans ce poème, ce dernier s'inscrivant dans un registre macabre et réaliste.

La modernité de Baudelaire

L'alliance des contraires

Un tableau réaliste et macabre

Sadisme de l'auteur qui reprend l'image de la femme fleur pour l'attribuer à la charogne : « comme une fleur s'épanouir »

Description réaliste et vivante de la charogne

Etapes de décomposition incitant au dégoût, renforcé par des enjambements et l'emploi de sonorités liquides (allitérations en L), mimant l'affaissement de ce cadavre au caractère vivant.

Chaque 1er alexandrin de chaque quatrain contient une étape de la putréfaction

Jeu sur les sens (hypotypose), qui sont convoqués pour décrire et suggérer l'horreur : "regardait", "exhalaisons", "puanteur si forte", "bourdonnaient", "étrange musique"

La transfiguration de la charogne en oeuvre poétique

Le registre lyrique côtoie le registre réaliste : adjectifs mélioratifs "beau", "si doux", + métaphores

La beauté et la laideur

La mort et l'amour

Parcourt tout le poème dans le rapprochement des rimes : pourriture/nature, infection/passion, soleil de ma nature/ordure : les termes de l'éloge riment avec leur contraire.

Analogie entre la femme et la charogne "vous serez semblable à cette ordure".

La mort semble objet de plaisir, allégorie de la luxure et de l’obscénité : "suant", "jambes ouvertes", "brûlant".

La mort s'épanouit comme une fleur, tandis que "vous crûtes vous évanouir"

Adresse à une femme : clichés de la poésie lyrique "étoile de mes yeux", "soleil de ma nature", "vous, mon ange et ma passion!" La femme comme allégorie de la mort,

Cherche à extraire la beauté de la laideur : Oxymore "carcasse superbe".

Aspect d'une conversation autour d'un souvenir : impératif "Rappelez-vous !", "plus qu'un rêve", "oubliée", "seulement par le souvenir", "nous" --> invitation au voyage

La célébration de la femme aimée s'oppose au lexique réaliste de la mort et de la pourriture

Polysémie du mot "lit" --> lit des amants ou cerceuil

Image d'un amour dévorant : "qui vous mangera de baisers"

Utilisation de termes soutenus pour désigner l'horreur, euphémismes : "exhalaisons"

Transfiguration des strophes 7 et 8

Disparition de la charogne et du registre reéaliste : La carcasse s'efface peu à peu : "s'effacaient", "oubliée", "souvenir".

Elle devient donc forme d'art. Idée de légereté, de pureté

champ lexical de l'art, usage de métaphores et de comparaisons pour désigner la charogne.

L'art comme dernier recours pour préserver la beauté. La mission du poète est de garder la "forme" et "l'essence divine" pour en faire de la poésie.

Conclusion

Après la mort ne reste que la poésie de Baudelaire, la femme a disparu tandis que sa poésie devient immortelle. La tradition poétique du Memento Mori permet donc à Baudelaire de dévoiler la mission du poète, étant de tenter de transformer la boue en or, et d'ainsi extraire la beauté du mal.

Les verbes de mouvement donnent l'impression d'un tableau animé.

Métaphore du mouvement respiratoire :descendait/montait, tel un souffle de vie.